VELO :
Difficile de faire un récit exhaustif de cette partie… Et pourtant j’ai encore la tête remplie d’images, de souvenirs, de sensations…
Les premiers kms sont plats, c’est « roulant », j’ai les pieds gelés et les mains également malgré les gants. Je m’alimente un peu. Au hasard des dépassements et changement de rythme on échange quelques mots. Aux premières bosses, on distingue quelques kamikazes qui passent « sur la plaque » tout en danseuse… sans doute pour se dégourdir les jambes ! Lors de la première longue bosse qui décrit un arc de cercle j’aperçois tout en haut Christophe, reconnaissable à son coupe vent vert fluo. C’est la dernière apparition fugitive que j’aurais de lui avant une bonne douzaine d’heures.
Première descente difficile pour moi qui suis déjà un peu tendu lorsque c’est un billard… alors sur une route « single car » avec un peu de graviers deçi-delà et des virages de montagne… cela ne me permet pas un grand relâchement.
La première montée commence avec un certain soulagement, le paysage est déjà superbe, j’échange quelques mots avec le dossard n°10, Yves, qui est de Dijon et qu’il me semble avoir déjà vu quelquepart bien que je ne sois pas physionomiste… il a fait Troyes en 2008… peut être là-bas ? Je franchirai la ligne 14H plus tard après une course où nous nous « croiserons » en permanence au hasard des crevaisons, allures différentes dans les côtes ou en descente que ce soit en vélo ou à pied… (après avoir fait le même chrono à T1 à la seconde près et à quelques secondes près à T2…).
Je me réchauffe doucement, j’admire les paysages, je passe pour la première fois le 34*29 (déjà !!!) dans un passage en côte vent de face qui s’éternise… Les sensations ne sont pas superbes je dois l’avouer. La première (je pense) féminine me passe dans le dernier km du col peu avant le 40ème, je la suis de loin dans la courte descente roulante et rapide qui suit puis m’arrête en sa compagnie au ravitaillement. Les bénévoles sont là encore (comme sur tout le reste de la course sans exception) adorables et aux petits soins : ils nous forcent presque à remplacer systématiquement nos bidons par des neufs remplis à ras bord, nous gavent de friandises, nous félicitent, nous encouragent avec sincérité sans se lasser malgré les heures passés là à enchaîner les postes sur le parcours… que faire d’autre que repartir d’attaque à chaque fois !
Je repars donc à la suite de cette première féminine qui roule fort ! Elle me distance peu à peu, je repasse mon numéro 10 qui m’a doublé lors du ravitaillement, on échange quelques mots, puis je reste à bonne distance de ma fusée pilote que j’ai retrouvé à l’issue d’une pause « technique ». La route est large, en faux plat descendant jusqu’au 70ème, mais il faut toujours pédaler un peu car le vent est de face et faire attention où l’on pose les roues car la route est humide et un peu boueuse par endroit. Peu avant de tourner pour attaquer le col du port de pailhères je perçois un louvoiement de la roue arrière, je m’arrête « prestement » (= rapidement mais en souplesse pour ne pas chuter bêtement) détectant une crevaison. Démontage puis inspection me permettent de découvrir qu’un « gros » morceau de bois a traversé le pneu et la chambre à air… Merci à Christophe de m’avoir permis de découper un morceau de vieux pneu avant le départ, ce qui me permettra de repartir en le glissant entre le trou et la nouvelle chambre car sinon c’était l’abandon… Je répare calmement en me disant que cela permet une petite récupération. De nombreux triathlètes me demandent en passant si j’ai tout ce qu’il faut pour réparer, sympa ! Je repars donc après ces 10’ d’arrêt forcé et attaque le premier gros morceau du jour : les 15kms du col du port de pailhères.
La montée est grandiose, gros pourcentage et vent de face se faisant plus forts à mesure que le sommet approche. Le ravitaillement « perso » du 75ème permet une petite pause avant les 10 derniers kms d’ascension. Je pense enlever ma parka et mes gants mais les bénévoles m’indiquent « qu’en haut il y a du brouillard, qu’il fait 2°C, que le vent est fort et que la descente est humide. Je me rhabille sagement et les remercie de l’information. On repart, le vent prend des tours, plus aucune habitation ne l’arrête. Quelques lacets permettent aux rafales de nous alléger la pente virtuellement de quelques pourcents mais le virage suivant nous scotche à nouveau. Le 34*29 est en train d’être rentabilisé et j’alterne avec de petites périodes en 34*25, en danseuse pour ménager le dos et les psoas qui commencent à s’étonner d’une si longue sollicitation. Les kms passent lentement mais le paysage est sublime… A moins de 2kms du sommet je rejoins Yves que je salue à nouveau. Quelques mots sont échangés sur le spectacle, un accord sur la stratégie de course à adopter : patience, patience, patience et gestion ! Et chacun continue au rythme qui lui convient sans pour autant y voir un quelconque esprit de compétition. Col franchit en 4H37…
La descente contraste avec la montée : route large, grand lacets, toboggan vertigineux dans lequel il ne faut pas oublier qu’un vélo de route ça freine… un peu… mais pas de réel danger cette fois.
Les derniers kms de la descente sont plus calmes et « champêtres » puis virage à droite, et panneau : « col du pradel » 7kms. C’est reparti ! On remet presque tout à gauche et on reprend son rythme. La température a monté, le soleil chauffe, le versant est abrité du vent. Sommet atteint en 5H38, petite pause pour réenfiler mon coupe vent et me restaurer. Cette fois la descente est plus technique… petite route arborée, sinueuse avec quelques plaques de graviers, de petites branches, quelques gros cailloux et… petites pierres dont une que je ne vois pas. Ca tape un peu et quelques dizaines de mètres plus loin je sens la roue arrière qui se promène. Je m’arrête au plus vite conscient que vu la route, mon habileté naturelle en descente et la crevaison rapide cela risque de se solder par une belle chute. Démontage, crevaison basique suite à une pression un peu faible (réparation précédente) et gros choc qui pince la chambre. 5’ plus tard je suis de nouveau sur le vélo au moment où Yves repasse… Je lui dis avec humour que c’est ok et que dorénavant je le laisse devant car dès que je prends le large, je crève ! Il me lâche un peu dans la descente où je me crispe encore davantage (sisi, c’est possible) alors que je n’ai qu’à suivre sa trajectoire de loin.
Arrivé au 120ème on attaque de concert 2kms très pentus qui nous mènent à un « plateau » vent dans le dos avec des faux plats montant et descendant réguliers sur quelques kms. Je prends un peu d’avance dans ce paysage de plaine vallonnée entourée de sommets. Puis descente rapide et sûre dans laquelle je m’amuse (pas de virages…) jusqu’au 135ème et le second ravito personnel. J’y retrouve « seb c’est bien » et yves me rejoins. J’abandonne définitivement mes gants et ma parka, je me ravitaille, on discute un peu, j’envoie quelques sms pour rassurer tout le monde et on repars avec un peu de marge encore sur l’heure limite, que demande le peuple !
Les bénévoles (et seb) nous ont expliqué la suite du menu : c’est descendant encore quelques kms puis ça monte doucement avant de devenir très dur… ok on est prévenu.
Au début du col, nous reprenons chacun notre rythme et en effet peu à peu ça devient… très dur… le col n’en finit pas sans aucune zone de relâche. Je reste calme, en gérant la montée sur un rythme continue, sans chercher à trop pousser sur les pédales. La chaleur est plus forte et le vent absent. Les hectomètres (j’ai largement le temps de les apprécier) s’égrainent doucement, très doucement… puis un poste où on m’annonce « le col de garavel à 6kms… » heu… en fait nous arrivons sur une portion en altitude relativement plane entourée de plusieurs sommets (relativement plane = de courtes descentes et montées successives) durant quelques kms avant d’aborder une dernière portion montante qui se fait une nouvelle fois « tout à gauche ». Le franchissement du col est vécu comme une mini victoire et j’enchaîne sur une descente assez facile même si sinueuse durant quelques kms. Une courte mais difficile rampe me rappelle à la raison avant d’enchaîner à nouveau sur une belle descente qui me mène au fameux « 163ème km » et LA cote de l’épreuve. Petite pause au ravitaillement qui la précède et j’entame cette difficulté avec prudence, me souvenant qu’à la vue du parcours et de son profil ce n’est pas cette côte qui est la plus dure, mais l’enchaînement qui suit. Je possède 1H d’avance sur l’horaire limite, je peux continuer à gérer donc. Et en effet, même si difficile, les 3kms passent bien (dont une partie sous les arbres), avec des encouragements nourris de supporters espagnols dans les derniers hectomètres et les félicitations de riverains au sommet. La vraie difficulté réside dans les 6/7kms qui suivent : tout d’abord une succession de petites descentes suivies de « coup de cul » proches des 10/12% puis une longue montée qui n’en finit pas dans la forêt sur une route large… je me demande où l’on va et quand cela va finir… chaque virage donne sur une nouvelle ligne droite toujours en pente, qui, même si moins raide que les précédentes, finit par user et le physique et le mental.
Enfin, j’entame une descente qui me ramène sur la route principale nous ramenant au lac. Je passe le marquage « 180 » au niveau du repère km « 2 » de la départementale et me dit donc qu’au « 9 » on devrait bifurquer. Je suis dans les temps pour passer sous les 10H malgré mes 2 crevaisons. Les kms passent à une moyenne cette fois raisonnable, bien aidé par un vent enfin de dos qui permet d’avaler les faux plats avec ce que pourrait presque qualifier d’ « aisance ». Je passe la borne « 10 » et toujours rien à l’horizon… au « 11 » je tourne à droite et m’engage dans la forêt. Encore un bon km et j’emprunte la petite route qui me mène à l’aire de transition.
Je descends du vélo après 10H05 de chevauchée mémorable sous les encouragements et les félicitations des spectateurs et les commentaires du speaker. Je marche prudemment jusqu’au parc. Je suis préparé sans crainte ni rejet à un marathon en 6H minimum et persuadé qu’il ne me sera pas possible de courir après un tel parcours et une si faible préparation…
1 commentaire:
Ce fût un plaisir que de te croiser. Encore bravo d'avoir relevé ce défi "à l'arrache" ! ;-)
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