T2 :
Discussion avec mes voisins de « chambrée » et avec les bénévoles qui nous ont rangé nos affaires et mis à sécher les combis. Je déguste un petit sandwich bien agréable en me changeant tranquillement. J’attrape mon petit sac « banane » dans lequel j’ai fourré quelques gels auxquels je ne toucherai pas, profitant plutôt de la variété des ravitaillement (y compris bonbons haribo…), quitte le parc et me risque à trottiner jusqu’au premier poste de ravitaillement.
CAP :
On m’oblige presque avec sollicitude à emporter une petite bouteille d’eau, je m’exécute après avoir attrapé quelques tucs et une pâte de fruit. Je recommence à trottiner tout doucement et je m’étonne d’être relativement à l’aise dans l’exercice. Je décroche le téléphone pour rassurer l’entourage, me fait disputer avec sympathie par Mitch qui me dit qu’il aurait du être là si je l’avais prévenu de ma participation pour m’encourager (=me botter les fesses pour me faire avancer plus vite). Je lis les messages de mon cousin qui m’en enverra encore d’autres durant toute la course, rassure ma femme et je continue ma promenade en sous bois puis traverse le lac sur le haut du barrage. Le temps est agréable, je décide de déclencher le chrono tous les 5kms et de ne raisonner que sur cette distance en permanence. Après 3 bons kms de plat (= sous bois+route) on attaque une côte qui nous mène au demi tour. Je croise le premier qui en est au 34ème km et qui est encore tonique dans la descente. Je fais 2 fois le tour de la chaise du bénévole chargé du pointage en riant avec eux et redescend en souplesse. Je croise Yves un peu plus loin et on se salue. Je dois avoir une grosse dizaine de minutes d’avance. Il a l’air bien. A chaque fois que 2 triathlètes se croisent nous échangeons un regard de soutien, un hochement de tête, une tape dans la main, un mot d’encouragement ou de félicitation. Mes pulses sont scotchées à 132bpm sur le plat. Je suis capable de dire lorsque je suis à 134 ou à 130, amusant comme cela se joue à peu de choses… je repasse devant le parc au 9ème km et après avoir rejoint la départemental je remonte vers le centre ville des Angles. Il faut être vigilant dans cette partie « routière » qui n’est pas la plus sexy mais bon… le reste du parcours rattrape largement ce petit désagrément. Je croise Christophe qui redescend et déjà au 26ème kms. Il a l’air bien et fait une super course !
A partir du 13ème on attaque une petite descente raide puis une montée où il faut marcher avant un replat qui précède… une montée à gros pourcentage sur presque 2kms… j’alterne marche et petits pas de course jusqu’en haut. Ravitaillement toujours aussi chaleureux et motivant en plus d’être complet et on descend de l’autre côté vers un petit lac que l’on n’aperçoit pas encore (une pause technique derrière un arbre…). Petite remontée, parking, ravitaillement puis 500m à longer ce petit coin de paradis avant de faire demi tour. Je me promets d’y revenir en touriste tant l’endroit est agréable. Je croise Yves qui m’a repris un bon paquet de minutes et qui a toujours le sourire. On se marre et on se dit à tout à l’heure.
Il ne reste qu’à remonter tout ce qui a été descendu (au petit trot, les pourcentages étant raisonnables) puis à redescendre prudemment les forts pourcentages pour ménager mes genoux. Je passe au semi en 2H33, je trottine toujours sur le même rythme. Je suis aussi toujours mauvais en descente et j’ai renoncé à espérer une amélioration de ce côté. Yves me dépose dans la seconde descente… il court bien 2kmh plus vite que moi dès qu’il y a un peu de pourcentage… ppfffuuu. A la sortie du centre ville je croise Christophe qui est à moins d’1km de la fin et je le félicite de sa perf, 15 jours à peine après frankfurt (et au passage après avoir déjà fait le doublé lanza-belfort cette année !). Je vois yves à quelques centaines de mètre devant. De retour devant le parc au 29ème km je passe prendre ma frontale par prudence en cas de coup de moins bien, le passage dans les bois pouvant se révéler technique dans la pénombre et avec la fatigue. Au niveau physique tout est stable à présent. Les quadris font mal juste ce qu’il faut mais ça ne s’aggrave plus. Je gère cela juste comme une information et cela ne m’empêche pas de trottiner. J’allonge même un peu le trot entre le 30 et le 35ème et le chrono suit. Rien d’extra, juste 1’ de gagné au 5 kil’ par rapport au départ mais c’est agréable de voir que la machine fonctionne toujours bien. Avant dernier passage au ravito du « CCAS » qui a terminé le saucisson mais qui me promet de l’eau pétillante à mon prochain passage dans 2kms. J’attaque la côte au trot, croise encore une fois Yves, refait mon « double tour » de chaise, salue une dernière fois les bénévoles de ce poste et les remercie puis retour vers la base. Le rythme reste le même… proche de 10kmh à présent. On s’encourage tous les uns les autres. J’échange quelques derniers mots amusés avec Cathy à qui je promets de ramener les gants gentiment prêtés le matin, puis je traverse une dernière fois la forêt, ma frontale venant s’ajouter à la lumière du jour qui décline doucement. Avant de franchir le ponton me séparant du passage devant le parc j’entends un « allez Antoine ! ». C’est Yves qui est allé récupérer sa frontale et qui m’attend pour que nous finissions ensemble. Son attitude me touche et montre bien l’esprit de cette course et son fair play. Nous entamons donc de concert ces 3 derniers kms en papotant. Il est persuadé de ne pas boucler le marathon en 5H. Comme je suis sur ces bases et qu’il a démarré un bon ¼ h derrière moi, je m’étonne de son calcul. Il s’aperçoit de l’erreur et en effet, il sera largement sous les 5H! Nous ne relâchons pas le rythme dans le faux plat de la départementale en prenant garde de courir l’un derrière l’autre. Des voitures nous croisent ou nous doublent au ralenti, fenêtre ouverte et les encouragements / félicitations nous portent jusqu’à la dernière petite côte bien raide que nous escaladons en courant pour le symbole. C’est déraisonnable mais cela fait un bien fou ! On débouche sur la petite place sous les encouragements avant de descendre côte à côte jusqu’à l’espace blanc-bleu. Virage à droite, dernier faux plat escaladé au pas de course, comme si nous venions de prendre le départ, entrée de concert dans la salle, musique tonitruante, applaudissements, speaker, nous montons les quelques marches qui nous séparent du podium. On se tient la main et lève les bras. Photo finish commune Yves et moi qui traduit le sentiment de « fraternité » amené par ces heures d’effort partagé.
C’est fait. Je suis finisher, nous sommes finishers de ce triathlon hors normes. Est-ce le plus dur au monde? On s’en fout ! C’est un triathlon très dur, c’est tout, grandiose à tous les niveaux et qui a su faire passer la difficulté d’un parcours par la beauté des endroits traversés et à l’état d’esprit d’une population qui nous a porté durant toutes ces heures. Il n’y avait pas 100000, ni 10000 personnes au bord des routes, mais chaque bénévole, chaque spectateur nous encourageait en nous regardant dans les yeux avec une tonalité sincère qui force à continuer et à refuser de douter. Chaque point de ravitaillement a été un îlot de soutien et l’attention est allé jusqu’à retrouver rangé toutes nos affaires, combinaison sèche comprise, lorsque nous retournions au parc en pleine nuit récupérer notre package.
Finisher d’un « ultra IM », cela demande simplement un peu d’expérience, un entraînement régulier même si pas énorme en volume, de la volonté et une bonne connaissance de soi.
Ce que je retire de ce 5ème IM est un étrange sentiment de respect de mon corps pour ce qu’il a accompli simplement parce que je lui ai demandé. J’ai juste eu à en prendre soin durant toute la course en l’alimentant « en eau et en charbon », en évitant de le brusquer, en le protégeant des conditions météo et en ne cédant pas mentalement.
Chronos Yves/Antoine:
TOTAL : 16h36’18 (49ème sur 93 finishers)
Natation : 1H09’14 / 1H12’32
T1 : 11’40 tous les 2 (sisi)
Vélo : 10h27’29 / 10h05’14 (9h50 si on enlève les crevaisons…)
T2 : 10’48 / 10’29
Cap : 4h37’08 / 4h56’23
2 commentaires:
tout simplement enorme
yes ! vraiment énorme ! ça fait rêver, ça crée des envies, encore une fois un joli récit dans lequel on ressent vraiment le plaisir que t'as eu à y participer. Effectivement il semblait y avoir une ambiance très particulière très certainement lié à la difficulté. J'espère que les prochaines éditions garderont cet esprit bon enfant. RDV dans 2ans aux angles ? ;-) (oui, je retourne m'entrainer...)
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